INCLUSION
3. Lois, plans, politiques et programmes
6. Enseignants et personnel de soutien
Éducation inclusive
Le Plan sectoriel de l’éducation post 2015 (2018-2030) définit l’éducation inclusive comme un « processus qui vise à accroître la participation et réduire l’exclusion en répondant efficacement aux différents besoins de tous les apprenants. Elle prend en compte les besoins individuels en matière d’enseignement et d’apprentissage de tous les enfants et jeunes gens en situation de marginalisation et de vulnérabilité : enfants de la rue, filles, groupes d’enfants appartenant à des minorités ethniques, enfants issus de familles démunies financièrement, enfants issus de familles nomades/ réfugiées/ déplacées, enfants vivant avec le VIH /SIDA et enfants handicapés. L’éducation inclusive a pour objectif d’assurer à ces enfants, l’égalité des droits et des chances en matière d’éducation ».
Le Plan se base sur les principes directeurs pour l’inclusion établis par l’UNESCO (2005) : « [L’éducation inclusive suppose la transformation et la modification des contenus, des approches, des structures et des stratégies, avec une vision commune qui englobe tous les enfants de la tranche d’âge concernée, et la conviction qu’il est de la responsabilité du système éducatif général d’éduquer tous les enfants. »
Le Plan sectoriel de l’éducation post 2015 (2018-2030) définit l’éducation spécialisée comme l’ensemble des activités d’éducation et de formation destinées à des personnes atteintes de handicap physique, sensoriel ou mental ou ayant des difficultés d’adaptation personnelle et d’intégration sociale, afin de faciliter leur adaptation et leur insertion sociale. Des écoles spécialisées sont toujours en place dans le pays. Ces dernières suivent le Programme d’intégration des mineurs handicapés mentaux non scolarisés (PINS) dans la prise en charge du handicap mental. Le Centre d’études et de documentation (CED) et le Centre Saint François d’Assise sont des exemples d’établissements d’éducation spécialisée pour enfant handicapés mentaux. Toutefois, le pays vise à travailler progressivement avec l’appui des centres spécialisés, à rendre les écoles publiques, inclusives.
En dehors des centres spécialisés précités, il existe d’autres structures privées de prise en charge et d’accompagnement des enfants handicapés intellectuels telles que : La Chrysalide, Le cercle des oliviers, La colombe hibiscus, les écoles inclusives Sainte-Jocelyne et Paix et joie. Il existe également d’autres établissements scolaires privés qui accueillent les apprenants ayant d'autres types de handicaps tant auditif que visuel. Notons que certains enfants sont orientés dans les écoles inclusives privées où l’équipe fait le suivi scolaire de ces enfants.
La loi 2003-017 stipule que l’école doit « sauvegard[er] l’égalité des chances pour tous ». Elle soutient que des stratégies doivent être mises en œuvre pour assurer l’intégration des enfants à besoins spécifiques dans le système. Ces stratégies exposées dans cette section s’articulent autour de l’appui aux initiatives des ONG et des communautés en faveur de l’éducation de ces enfants. Ces dernières assurent un soutien à l’intégration scolaire des enfants en milieu ordinaire selon le degré de handicap et de la création des structures d’accueil des enfants à besoins spécifiques. Le Plan sectoriel de l’éducation 2018-2030 envisage des options stratégiques en vue de la prise en charge scolaire des enfants handicapés dans le milieu scolaire ordinaire. Il stipule aussi que les centres spécialisés n'accueilleront que les enfants polyhandicapés.
Handicap
La Loi 2017-06 portant protection et promotion des droits des personnes handicapées en République du Bénin stipule que toute personne handicapée bénéficie d’un accompagnement psychosocial, d’une réadaptation et d’une éducation fonctionnelle. De plus, elle avance que L’État doit garantir le droit à l’éducation, à l’enseignement et à la formation aux personnes handicapées. L’éducation est gratuite et inclusive en milieu ordinaire pour les enfants et adolescents handicapés dans les établissements scolaires publics. Aucun établissement scolaire ne peut refuser son accès à une personne handicapée du fait de son handicap. En parallèle, le code de l’enfant (loi 2015-08 du 23 janvier 2015) met l’accent sur l’intégration des enfants à besoins spécifiques. Notons qu’il n’existe pas encore de décrets d’application pour la loi 2017-06 portant protection et promotion des droits des personnes handicapées au Bénin.
Du point de vue des politiques et des plans d’action, le Plan décennal de développement du secteur de l’éducation 2006-2015 identifie certains programmes spécifiques menés au profit des personnes handicapées. Par exemple, sur cette période des personnes handicapées ont bénéficié de programmes d'alphabétisation et d'éducation. Une étude de faisabilité a été menée en vue de la création de centres d'alphabétisation au profit des personnes handicapées et 12 centres d'alphabétisation ont été ouverts à titre expérimental pour accueillir notamment des personnes handicapées. Il est également prévu dans le Plan sectoriel de l’éducation post 2015 (2018-2030) et dans la Politique nationale de protection et d’intégration des personnes handicapées d’accorder des subventions aux structures développant des initiatives pertinentes en matière d’éducation pour les enfants à besoins spécifiques, et d’organiser des séances d’encadrement au profit des centres et structures ayant des initiatives pertinentes en éducation inclusive. Un projet de Convention de partenariat pluriannuelle (2018-2021) encadrée par l’Agence française de développement visera aussi à renforcer les capacités de planification, de mise en œuvre et de suivi de l’éducation inclusive du pays. Le Bénin devrait aussi recevoir un appui à l’élaboration de plans sectoriels, stratégies et politiques éducatives inclusives. Enfin, quant à l’intégration des enfants à besoins spécifiques des régions éloignées, aucune mesure ciblée n’a été prise pour s’attaquer aux disparités territoriales existant entre les départements et les communes et surtout entre les zones rurales et urbaines.
Différents programmes ont été mis en place pour ce groupe. Le pays accorde un appui financier aux jeunes handicapés pour leur formation professionnelle. Le Plan sectoriel de l’éducation post 2015 (2018-2030) donne aussi l’exemple du programme « Intégration scolaire des enfants handicapés » développé dans neuf communes du Zou à travers le Projet d’appui au secteur de l’éducation au Bénin (PASEB) sous la coordination d’Équilibre Bénin (qui assure la scolarisation et le parrainage des enfants handicapés et la formation aux métiers professionnels). Le projet, surtout axé sur l’éducation spécialisée, a permis d’offrir du matériel scolaire, une rééducation fonctionnelle et des interventions chirurgicales à 300 élèves ayant des handicaps lourds ou des infirmités motrices cérébrales. Le Programme d’appui à l’intégration scolaire des enfants handicapés (PAISEH) a été créé au sein du ministère des Enseignements maternel et primaire, mais peu d’activités ont été menées dans le cadre de ce programme depuis sa création. Ce programme n’est pas axé sur l’éducation spécialisée, mais sur l’intégration scolaire. Un autre projet a été mené à l’école des sourds et muets de Louho dans la banlieue de Porto-Novo où 212 entendant cohabitent avec 150 élèves sourds. Les enseignants ont reçu une formation en langues des signes pour assurer l’éducation des enfants grâce au bilinguisme. Le projet « Intégration scolaire des enfants handicapés » financé par le Danemark a permis quant à lui d’assurer la formation de 300 enfants handicapés avec 70 % de taux de promotion chaque année. Le Cercle des Oliviers assure la prise en charge psycho-éducative de 200 enfants, dont la plupart ayant des besoins spécifiques. Les enfants handicapés sont placés avec ceux non handicapés et sont sensibilisés sur les droits humains, les droits de l’enfant, les normes minimales d’accessibilité, et la prévention des risques d’accident pouvant conduire au handicap. La Coalition béninoise des organisations pour l’éducation pour tous outille quant à elle les parents d’élèves ayant un handicap. Le programme d’appui à l’inclusion des personnes handicapées (PAIPH) soutient ce groupe par des activités de sensibilisation et de formation. Il veille à installer des rampes (amovibles) et d’autres aménagements dans des écoles. Ce programme a aussi instauré une Cellule d’action pour le développement inclusif du village/quartier (CADIV). Le SSPH/OCPSP vise quant à lui à accompagner les élèves handicapés, en majorité les filles. De son côté, Handicap international a mis e n place un projet visant à améliorer l'inclusion de 780 enfants handicapés dans les écoles primaires des régions urbaines et rurales et procure des soins de santé, des conseils en matière d'éducation et de carrière, la formation des enseignants, etc. Le projet Agir pour la pleine participation des enfants handicapés par l’éducation (APPEHL) vise à intégrer les enfants handicapés des départements béninois de 42 écoles primaires de l’Atlantique et du Littoral dans le système éducatif. Un autre projet, Educate a Child (2016-2019), cible les enfants handicapés hors école et vise à accroître leur accès et leur maintien à l’école, à renforcer l’inclusivité de leur environnement scolaire et à faire évoluer les politiques par un plaidoyer pour l’éducation inclusive. Enfin, l’association MIWADAGBE offre différents programmes pour les élèves ayant un handicap intellectuel, dont le Programme d’intégration des non scolarisés (PINS), qui vise une planification pédagogique individualisée et l’instauration d’un système de suivi. D’autres initiatives en faveur de l’éducation inclusive portées par la CBO-EPT sont aussi à noter. L’organisme organise des formations au profit des parents, enseignants, corps de contrôle, encadreurs, et inspecteurs de l'enseignement.
Genre
Les lois 2003-017 et 2005-33 assurent l’égalité des genres en éducation, avec une attention particulière portée aux jeunes filles et aux plus vulnérables (articles 3, 5, 12, 13). Une politique visant à améliorer les chances d’accès et de rétention des filles dans le système scolaire a aussi été mise en œuvre par la Direction de la promotion de la scolarisation du ministère des Enseignements primaire et secondaire. Cette dernière a permis de mettre en place le Réseau national pour la promotion de la scolarisation des filles, de former les enseignants sur leur responsabilité dans l’éducation des filles, de créer une unité focale de lutte contre le VIH et le SIDA en milieu scolaire, d’organiser des campagnes de sensibilisation sur l’éducation des filles et d’octroyer des fournitures et uniformes scolaires aux élèves démunies. Notons que cet organisme n’existe plus depuis 2016. Le Plan sectoriel de l’éducation post 2015 (2018-2030) vise quant à lui à renforcer l'accès et le maintien des filles dans l'éducation de base par la mise en place de mesures favorisant le recrutement et le maintien d'enseignantes dans les zones rurales. Il vise aussi à assurer l’exonération des frais d’inscription des filles au collège. Il aspire aussi à sélectionner des textes sur le harcèlement sexuel, la lutte contre le mariage des enfants et les autres violences et à mettre en place des unités d'écoute des filles dans les établissements. Antérieurement, le Plan décennal de développement du secteur de l’éducation 2006-2015 visait quant à lui la promotion des filles dans les filières agricoles et industrielles, notamment par l’octroi de bourses. Au début des années 2000, des centres féminins d’alphabétisation ont été construits sur l’ensemble du territoire et le projet Scolarisation des filles par l’alphabétisation des femmes a permis de contribuer à réduire significativement l’écart entre le taux de scolarisation des filles et des garçons. Aussi, le Plan prévoit l’instauration d’activités de type recherche-action menées dans les communautés présentant des écarts importants en termes de scolarisation des filles et de prise en charge des enfants à besoins spécifiques. Il est difficile toutefois d’évaluer la portée de ces programmes.
D’autres initiatives mises en œuvre par des ONG pour promouvoir la scolarisation des filles ont aussi été mises en place, dont l’exemption des droits de scolarité des filles. Les mesures les plus efficaces ont été la réduction des coûts pour les familles (en particulier la gratuité de l’enseignement) et les activités soutenues de plaidoyer et de sensibilisation.
Enfin, du point de vue de l’inclusion des genres, notons qu’au début de 2013, il existait au moins neuf associations pour les homosexuels à Cotonou, Porto Novo, et Parakou. Il s’agit de Bénin Synergie Plus (BESYP), l’Union pour la solidarité, l’entraide et le développement (USED), les Amis de sans voix, Hirondelle Club Bénin, et Tous nés libres et égaux.
Zones rurales
La loi 2003-17 stipule que l’État doit assurer progressivement la gratuité de l’enseignement public et garantir l’équilibre inter-régional. La loi 2017-06 portant protection et promotion des droits des personnes handicapées soutient que l’État et les collectivités territoriales décentralisées doivent organiser des campagnes d’information, d’éducation et de communication en vue de la prévention des maladies invalidantes.
Pauvreté
La loi 2003-2017 accorde une attention particulière aux enfants des zones déshéritées et des groupes vulnérables. Dans le cadre du Plan décennal de développement du secteur de l’éducation 2006-2015, le gouvernement a pris des mesures pour redresser les déséquilibres, prévoyant notamment une discrimination positive en faveur des régions défavorisées et des engagements forts sur le plan budgétaire. Actuellement, le Plan sectoriel de l’éducation post 2015 (2018-2030) vise à mettre en œuvre une politique de ciblage des interventions pour les communes défavorisées en matière d'éducation. Il est notamment prévu de réaliser des recherches sur les causes du faible accès à l'éducation dans ces zones et d’offrir des fournitures et des services éducatifs de qualité dans les 25 communes.
Albinisme
Des activités de l’ONG Divine Connexion Worldwide permettent d’être plus inclusif vis-à-vis des élèves albinos. L'État s'est engagé à proposer des épreuves écrites avec des caractères de taille 20. Aussi, l’État intégrera une formation sur l’encadrement des élèves atteints d’albinisme au curriculum de formation des enseignants dans les écoles normales et formera les enseignants déjà en fonction.
Le secteur éducatif béninois est administré par trois différents ministères : le ministère des Enseignements maternel et primaire, le ministère des Enseignements secondaire technique et de la Formation professionnelle (qui s’occupe également du sous-secteur de l’alphabétisation), et le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique). Le Conseil national de l’Éducation aide à la coordination de tout le système éducatif national et veille au respect des grandes orientations éducatives (notamment pour l’éducation inclusive) et à la mise en œuvre de la loi d’orientation de l’Éducation nationale. Il peut émettre des avis et formuler des propositions sur la pédagogie, les programmes, l’organisation, les résultats du système éducatif et la formation des enseignants.
Différentes ONG précitées, telles que Handicap international ou la Coalition béninoise des organisations pour l’éducation pour tous – pour ne nommer que celles-ci – améliorent la qualité de vie des personnes vulnérables et aident ces dernières à accroître leur inclusion dans le système éducatif. Plan international Bénin, Éduco-Bénin et l'UNICEF promeuvent aussi l’intégration scolaire des enfants vulnérables.
L'article 13 de la loi 2003-17 affirme que « l’école doit avoir pour cadre des infrastructures répondant aux normes de l’architecture scolaire et être dotée du mobilier et du matériel adéquats ». Cette loi prévoit un accès par rampe inclinée pour les apprenants handicapés. Similairement, la loi 2017-06 portant protection et promotion des droits des personnes handicapées affirme que tout établissement de formation qui accueille des personnes handicapées doit procéder à des aménagements raisonnables en tenant compte de leurs besoins et rendre disponible l’accompagnement nécessaire pour faciliter l’éducation effective en fonction du handicap. Enfin, cette même loi (article 35) stipule que les apprenants handicapés sont en droit de bénéficier, tout au long de leur scolarité d'heures supplémentaires et de dispositifs particuliers lors de la passation d’épreuves.
La loi 2017-06 portant protection et promotion des droits des personnes handicapées vise à employer du personnel et des enseignants - y compris des enseignants handicapés - qui ont une formation qualifiée en fonction des différents types de handicap.
Le virage entrepris vers une éducation inclusive demande de former les enseignants. En attendant que tous les enseignants des écoles ordinaires ne soient formés progressivement à la prise en charge éducative des enfants à besoins spécifiques, le Plan sectoriel de l’éducation post 2015 (2018-2030) et la Politique nationale de protection et d’intégration des personnes handicapées prévoient affecter les enseignants qui ont des compétences spécialisées dans les centres spécialisés lors de cette période de transition.
En formation initiale, l’Université d’Abomey-Calavi offre un programme de Master 2 en Gestion des systèmes éducatifs. Dans le bloc « Éducation et développement », elle propose les cours : Éducation et genre, Langues nationales, Éducation et lutte contre la pauvreté et Éducation et sida, de 15 heures chacun. En formation continue, Plan international propose une formation aux enseignants et au personnel éducatif sur l’égalité des sexes dans l’éducation et sur les méthodes d’éducation inclusive et sensible au genre.
Dans les écoles spécialisées, le personnel enseignant reçoit le soutien d’une équipe multidisciplinaire (qui peut être composée d’un infirmier, d’un assistant social, d’un psychologue, d’un éducateur spécialisé, d’enseignants spécialisés, de gardiens, d’orthophonistes et d’orthopédagogues). L’équipe peut également être composée de kinésithérapeutes, de psychopédagogues, d'ergothérapeutes, de neurologues, de psychiatres, etc.), mais cet accompagnement n’est pas encore effectif dans les écoles spécialisées au Bénin.
Le pays n’a pas de rapport national de suivi sur l’éducation. Cependant, on peut tenir compte du rapport de la Revue annuelle conjointe du secteur de l’éducation comme instrument de suivi de l’éducation. Notons que la CBO-EPT a élaboré en 2019 un rapport national volontaire de suivi de la réalisation de l’ODD4 sur la période 2016-2018. Par ailleurs, en 2018, une étude sur le niveau de mise en œuvre de l’OOD4 dans cinq communes du Bénin a été réalisée.
Pour l’objectif spécifique d’assurer aux enfants de 3 à 15 ans et aux élèves de 15 ans et plus et au niveau post-secondaire une éducation de base équitable et inclusive, le Plan sectoriel de l’éducation post 2015 (2018-2030) identifie certains indicateurs, dont :
- indice de parité fille garçon selon le taux brut de scolarisation en enseignement général, au collège et en enseignement technique
- proportion de filles dans les filières de sciences et techniques agricoles (STA) et de sciences et techniques industrielles
- proportion d’enfants en situation de handicap inscrits au primaire
- taux d'abandon des personnes handicapées dans les établissements spécialisés (de 2,2 % en 2016 à 0 % entre 2021 et 2030).
Dans sa Contribution nationale volontaire 2018 à la mise en œuvre des ODD, le pays a identifié d’autres indicateurs de l’éducation inclusive, dont l’indice de parité (rural/urbain) du taux brut de scolarisation dans le primaire/secondaire. Le Portail de données du Bénin présente enfin certaines données sur tous les ordres d’enseignement, la pauvreté, l’alphabétisation et les inégalités sociales.